Eléments de diagnostic de la zone d’intervention :
Au Sahel, ce projet a été mené dans trois pays (Mali, Niger, Burkina Faso). La zone du Sahel est marquée par un climat semi-aride chaud à saison sèche « hivernale » (source : wikipedia)
Problématique de la zone (au Sahel) justifiant une intervention :
Les systèmes agricoles au Sahel sont caractérisés par une forte précarité qui s’est accentuée ces dix dernières années. Marquée par des crises alimentaires majeures depuis 2007, la région se trouve aujourd’hui face à l’urgente nécessité d’augmenter sa production agricole, mais aussi d’améliorer la qualité de l’alimentation de ses populations tout en intégrant les contraintes et les enjeux sociaux et environnementaux qui lui sont propres.
Densification des zones rurales, fortes pressions sur les ressources naturelles telles que la terre, l’eau, les forêts ou encore les ressources du sous-sol, fragilité des écosystèmes (due en particulier à un climat caractérisé par une pluviométrie faible et aléatoire), perturbations climatiques sont autant de facteurs contribuant à une baisse progressive de la fertilité des terres et à une plus grande vulnérabilité des populations.
Les États sahéliens promeuvent et soutiennent un modèle agricole qui est à l’origine de la vulnérabilité accrue du système agricole et de la fragilité des écosystèmes. Il repose sur la modernisation de l’agriculture : intensification et spécialisation des productions agricoles à travers l’utilisation d’intrants chimiques importés, moto-mécanisation moderne, extension des surfaces cultivées, etc. Ce modèle s’appuie sur les cultures d’exportation (essentiellement le coton) et les filières fortement soutenues par les États (par exemple le riz) De plus, les politiques internationales ainsi que les gouvernements de la zone font actuellement le pari de l’agrobusiness pour assurer la sécurité alimentaire à travers une incitation des investissements étrangers (multinationales). Ces choix politiques ont des impacts déstructurants pour les paysanneries et les territoires ruraux : dépendance accrue des paysans aux facteurs de production externes et vis-à-vis des filières organisées, tensions foncières, mise en cause du droit d’échange ou de vente des semences paysannes, faible mobilisation des moyens de la recherche publique pour certaines pratiques agricoles (en particulier les filières vivrières locales) , dérégulations importantes des marchés…
Au Sahel, l’un des enjeux prioritaires est de soutenir l’agroécologie paysanne, en tant que moteur d'une transition écologique et sociale, qui aille au-delà d’un simple changement dans les pratiques quotidiennes. Son maintien et son développement dépendent de l'action des gouvernements, mais aussi des organisations paysannes elles-mêmes, à travers des politiques actives de soutien, des financements adaptés ou la sécurisation du foncier. La promotion de l’agroécologie paysanne nécessite ainsi une structuration des organisations paysannes et l'émergence de solidarités mobilisatrices avec les autres secteurs de la société (consommateurs, producteurs, communautés rurales, etc. ).Projet/ programme
En France :
- SIDI (Solidarité internationale pour le développement et l’investissement)
Au Sahel :
- COPAGEN (régional)
- IRPAD (Mali)
- AOPP (Mali)
- RHK (Mali)
- MOORIBEN (Niger)
- FCMN-Niya (Niger)
- VIIM BAORE (Burkina Faso)
- UBTEC (Burkina Faso)
Pour la région des Grands Lacs :
- INADES Formation Burundi (Burundi)
- ACORD (Burundi)
- CAPAD (Burundi)
- ACORD (RWANDA)
- UWAKI-NK (RDC)
Objectif global: Promouvoir un processus de transformation sociale et écologique des territoires ruraux de la région du Sahel et de la région des Grands Lacs, permettant aux populations de ces zones rurales de vivre bien, durablement, tout en étant solidaire d'autres territoires.
OS1:
OS2:
OS3:
Au Sahel, les initiatives des partenaires ont concerné :
Des activités de communication (production et diffusion de brochures, émissions radio sur l’agroécologie, ses enjeux, principes et effets) , de production de connaissances (études sur la règlementation semencière et les semences menacées d’extinction) et de mise en réseau (voyage d’échange, conférences et ateliers internationaux, foires aux semences paysannes, forums régionaux annuels, etc. ) ont également été menées pour valoriser les initiatives développées, démontrer leur viabilité économique et leurs bienfaits environnementaux et sociaux et pour promouvoir l’agroécologie. Les organisations ont aussi mené, à des degrés différents, des activités de plaidoyer.
Bénéficiaires directs: 4 coalitions nationales, 150 organisations paysannes, 200 comités de gestion, 830 leaders paysans, 4 600 chefs d'exploitations, producteurs, ménages agricoles, membres d'organisation communautaires de base (dont 3000 femmes paysannes),5 000 petits paysans emprunteurs.
Bénéficiaires indirects: 46 500 producteurs, 45 000 familles paysannes, collectivités décentralisées, services administratifs (foncier, eau et forêt, recherche agricole), autorités politiques locales, provinciales, nationales, ose dans le domaine agricole.
- AFD : 50% : 650 713 euros
(l’autre moitié étant financée sur fonds propres par le CCFD-Terre Solidaire)
Jessica PASCAL, ancienne responsable programme PAIES, acutellementchargée de mission partenariat Sahel : j.pascal@ccfd-terresolidaire.org
Le PAIES a globalement atteint ses objectifs et identifié ses marges de progression, ouvrant ainsi la voie à son extension mondiale. Le programme a contribué à remettre l’agroécologie comme alternative au modèle agricole conventionnel au cœur du débat dans ces deux zones, et à faire essaimer des pratiques plus respectueuses du milieu et de l’Homme. Il a également permis de valider l’hypothèse d’un programme multi-acteurs et multizones agrégeant une multitude de réponses à de grands enjeux agricoles et sociétaux, tant communs que spécifiques aux deux zones et à chaque pays de mise en œuvre, au sein duquel une gouvernance collective, orchestrée par le CCFD-Terre Solidaire et partagée entre toutes les organisations partenaires, permet d’obtenir des résultats encourageants.
Cette dynamique doit maintenant se poursuivre. Dès avril2018, le CCFD-Terre Solidaire et ses partenaires mettront en œuvre leprogrammeTAPSA, qui intègrera des partenaires latino-américains et asiatiques dans une démarche concertée et globale de promotion de l’agroécologie comme levier de transition écologique et sociale(pour une durée de 4 ans).
Les défis identifiés :
Les autorités publiques sont souvent en opposition ou manifestent du désintérêt face aux projets et aux initiatives portés par les organisations paysannes.
Cela se traduit par des difficultés de mobilisation des services techniques de l’Etat, des entraves pour la mise en œuvre et la réplication de certaines initiatives à plus grande échelle, mais aussi par la promotion de politiques publiques et de programmes de développement qui vont à l’encontre de l’intérêt et des positionnements portés par les organisations paysannes.
La question des semences et la reconnaissance d’un système semencier paysan doivent être au cœur d’une transition vers l’agro écologie, alors que les paysans et paysannes se heurtent à la difficulté d’accès à des semences de qualité (coût élevé des semences certifiées, mauvaise qualité des semences tout-venant, perte de diversité voire extinction de certaines variétés de semences paysannes, réduction des espaces d’échanges de semences paysannes, etc.).
La question de l’échelle de mise en œuvre des initiatives doit être posée : que faut-il amorcer à l’échelle individuelle et que faut-il amorcer à l’échelle collective et communautaire ? Certaines activités développées dans le cadre du programme (production et vente de plants fruitiers et agro forestiers, petit élevage, activités de transformation) pourraient être réalisées de manière spécialisée et constituer ainsi une activité génératrice de revenus para-agricole, notamment pour les jeunes.
L’accès à l’eau, corrélé à l’intensification de la sécheresse, est un enjeu fort. Certains partenaires du CCFD-Terre Solidaire, comme ACORD au Rwanda, ont développé des initiatives pilotes hors du PAIES, qui pourraient nourrir le programme d’expériences innovantes (à l’image du développement d’un dispositif de captation et de rétention des eaux de pluie).
L’accès aux ressources productives demeure encore difficile pour de nombreuses activités agricoles (eau, matière organique et végétale extérieure aux champs) et il est soumis à une compétition entre acteurs.
L’accès à la fumure et sa disponibilité sont encore très limités, par exemple. Les besoins en la matière sont importants, mais les moyens dont disposent les paysans pour en produire sont restreints. Les organisations partenaires du programme se sont montrées proactives sur ce point : INADES Formation Burundi est par exemple en train d’expérimenter des latrines qui permettent de récupérer la fumure humaine.
La pénibilité de certains travaux en lien avec les pratiques agro écologiques est un important défi à relever (notamment en termes de partage des tâches entre hommes et femmes ou de gestion de l’emploi agricole).
L’accompagnement proposé par les partenaires aux paysan.ne.s de leur zone d’intervention est lié à l’histoire des pratiques locales de développement agricole et rural, et reste encore fortement basé sur une approche descendante : vulgarisation agricole, formation par des experts qui ne valorisent pas suffisamment les savoir-faire paysans et qui n’aident pas à l’émergence et à la responsabilisation de leaders paysan.ne.s, etc.
Dans la région des Grands Lacs, les conséquences des changements climatiques (sècheresse prolongée, perturbation des calendriers saisonniers) vont nécessiter de s’inspirer de pratiques agro écologiques mises en œuvre dans des zones plus sèches, et de s’interroger sur les cultures à promouvoir : dans cette optique, il serait intéressant de favoriser les échanges avec la zone sahélienne.
Les densités élevées de population sur certains territoires et la forte pression sur les terres appellent à réfléchir à des nouveaux modes de gestion des terres, plus collectifs.